L’université de Northwestern a mis au point il y a peu un capteur qui mesure la fatigue vocale d’un individu. C’est sans fil, ça fonctionne par bluetooth, avec une appli mobile et ça pourrait révolutionner les professions vocales et leur accompagnement !!!!!
Il y a maintenant deux semaines, j’ai écrit un article sur Loquans et l’intelligence artificielle au service de la prise de parole en public, et je les remercie de leur relais sur les réseaux sociaux. L’application mobile de la start up de SUPELEC capte le son sur mobile et mesure tout un tas de métriques qui vous dit si oui ou non votre prise de parole est ok, percutante, etc. La prochaine étape, comme évoquée précédemment, serait de mesurer la qualité non seulement physiologique d’une voix, certaines applis comme Vocalis Health sont en passe de le faire, mais aussi ses caractéristiques esthétiques.
Les deux applis ont en commun d’enregistrement une vibration vocale via mobile ou microphone relié à un ordinateur ou une carte sonore. Mais il y a deux difficultés rencontrées pour la captation du son: la nature même du micro qui enregistrera des données extrinsèques au larynx et sa conséquence directe, la difficulté d’isoler le son de la voix de l’environnement.
C’est là justement que l’université de Northwestern à Chicago intervient, avec deux acteurs: John A. Rogers, éminent chercheur et pionnier en bio-électronique, et Theresa Brancaccio, enseignante dans le département opéra et grande avocate de la santé vocale des chanteurs, ont mis au point ensemble un micro ainsi qu’un algorithme qui permet.
Tous les deux ont créé un nouveau procédé qui permet de déterminer le degré de fatigue vocale d’un individu ou d’un chanteur. Il s’agit d’un capteur que l’on place sur le larynx. Ce petit appareil collecte des données transmises ensuite à une appli mobile qui, premier exploit, arrive à faire la différence entre la voix parlée et chantée. Le capteur près des cordes vocales permet aussi d’isoler le son de la voix de son environnement. Enfin, l’algorithme, en plus de différencier voix parlée et chantée, détermine votre degré de fatigue vocale. Comment fait-il? En envoyant une vibration sur un appareil connecté, que ce soit un téléphone mobile, une montre ou autre.
Cet appareil, d’après leurs créateurs, peut révolutionner la manière dont les personnes amenées à parler en public gèrent leur capital vocal. Il sera bien entendu tout aussi utile pour les chanteurs et les professeurs de chant, ne serait-ce que pour affiner le geste vocal et éviter tout forçage.
Les implications d’une telle invention sont multiples. Les professeurs de chant pourront l’utiliser pour amener leurs élèves à développer un geste technique sain et à développer leurs capacités en toute sécurité. Les experts en prise de parole et les experts voix comme moi pourront utiliser ce capteur pour faire un suivi complet de leurs clients. Avec encore un peu de travail, on pourra même à terme lancer une grande méta analyse pour vérifier la corrélation, voire la causalité, entre éloquence et santé vocale, cette fois-ci à coup sûr. Des études comme celles de Casey Klofstad sur l’impact de la fréquence fondamentale de la voix sur les votes auraient alors tout leur sens. Et soyons audacieux, on pourra peut-être même trouver d’autres indicateurs que la fatigue vocale, comme la raucité, l’asthénie ou même la richesse harmonique d’une voix pour encore enrichir la grille de lecture de l’impact de la voix sur un auditoire.
Au-delà de l’aspect révolutionnaire d’une telle invention, c’est surtout la collaboration entre un pionnier de l’électronique et une spécialiste de la voix qui a pu donner un tel résultat. En effet, Thérésa Brancaccio est à l’origine de l’appli Singer Savvy. A l’origine, il s’agissait d’un challenge où elle demandait à ses étudiants de gérer leur budget vocal. Ces derniers devaient écrire le nombre de fois où ils parlaient, chantaient, buvaient de l’eau, etc. Donc il s’agissait d’un monitoring papier qui s’est transformé en monitoring numérique.
John Rogers, de son côté, avait mis au point un capteur externe qui devait repérer les problèmes de déglutition chez les personnes ayant fait un AVC.
La synergie ne pouvait donc qu’être naturelle entre ces deux experts dans leur domaine respectif, a fortiori si les deux personnes travaillent dans la même université.
C’est justement ce type de synergie qu’il est nécessaire de développer entre experts de la tech et experts de la physiologie. Car elles permettront de développer des outils de ce type et amener à réellement améliorer le suivi des clients venant voir des coach vocaux ou même des orthophonistes.
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A propos
Emilien Hamel
Formateur en prise de parole et coach vocal, Expert Voix, Grenoble et visio